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Interview de Cristiana Reali à l'affiche de la pièce Foutue Bergerie

  • Laurence Ray
  • il y a 4 jours
  • 6 min de lecture

Cristiana Reali aime passer d'un personnage à un autre. L'année dernière, elle a été Simone Veil puis Blanche Dubois, l'héroïne d'Un tramway nommé désir. Elle a d'ailleurs obtenu le Molière de la meilleure comédienne dans un spectacle du théâtre privé pour ce rôle que tant de comédiennes rêvent d'avoir. Depuis quelques semaines, c'est dans Foutue Bergerie, la nouvelle création de Pierre Guillois qu'on peut l'applaudir sur scène. Dans ce drame rural loufoque à découvrir à Anthéa les 10 et 11 décembre, elle interprète non pas un mais trois personnages. Un plaisir de jeu pour cette comédienne passionnée.

Si Cristiana Reali est déjà venue jouer à Nice, lorsque Daniel Benoin était directeur du TNN – c'était dans Du moment que ça marche, une pièce de Woody Allen avec notamment Michel Boujenah - elle n'est étonnamment jamais venue sur la scène du théâtre d'Antibes. Elle s'en réjouit. « C'est toujours agréable d'aller jouer dans le Sud, surtout en hiver », nous a-t-elle confié lorsque nous l'avons contactée par téléphone il y a quelques jours pour parler de Foutue Bergerie, qu'elle nous a vraiment donné envie de voir.


Connaissiez-vous l'univers de Pierre Guillois avant qu'il ne vous propose Foutue Bergerie ?


Cristiana Reali : Bien sûr, je le connaissais déjà depuis quelques années. Un peu avant le Covid, on s'était dit qu'on travaillerait ensemble. On ne savait pas sur quoi et on réfléchissait. Il venait me voir jouer et j'allais voir ses spectacles. J'avais envie de me mettre un peu dans un univers différent de ce que je fais d'habitude et de participer à une expérience atypique pour moi.


Qu'est-ce qui vous plaît dans son univers ?


Cristiana Reali : Ce que j'aime dans ses spectacles, c'est qu'il y des choses très crues mais aussi énormément de poésie. Ce n'est jamais vulgaire. Pour moi, le fermier de la pièce est un personnage poétique. Il est dans un moment dramatique de sa vie. Dans cette famille, il y a le père, la mère, un enfant, et aussi des brebis qui sont harceleuses, un peu racistes. La pièce aborde aussi le thème de la différence. Ces brebis sont mi humaines-mi animales. Comme elles n'aiment pas les volatiles, elles les harcèlent. Ca me fait un peu penser au harcèlement scolaire. J'aime beaucoup ce spectacle. Ça me rappelle un peu les films italiens des années 50. J'aime beaucoup les comédies dramatiques : on trouve des moments drôles dans le drame.


Sous des airs de comédie, la pièce fait passer des messages...


Cristiana Reali : Pierre Guillois ne donne pas de leçons, ne fait pas de la politique et n'essaye pas de dire qu'il y a des gentils et des méchants mais il fait passer des messages. Il montre des traits de la société qui existent et avec lesquels on doit cohabiter et se battre. Dans la pièce, il y a une journaliste. Elle traite des sujets qui ne sont pas souvent abordés, comme par exemple le fait que les villes grandissent et envahissent peu à peu les campagnes. La pièce est une espèce de micro société. Il y a les banlieues, la campagne, les médias, la justice, les gendarmes, et puis les animaux.



Vous interprétez trois personnages, ce qui implique un rythme intense...


Cristiana Reali : C'est une pièce chorale. On interprète tous deux ou trois personnages. Moi, je fais une brebis et la mère et j'ai aussi une petite participation en tant que rédactrice en chef d'un journal. C'est très technique. C'est une concentration différente qui me plaît beaucoup. Je suis très concentrée même dans les coulisses. C'est très excitant. Il y a un côté schizophrénique. Je suis contente de faire ce genre d'expérience avec Pierre Guillois. Comme c'est un drame rural interrompu par des scènes de comédie, on n'est pas que dans un seul registre. Ce que j'ai aimé dans cette pièce, c'est qu'on peut passer du drame à la comédie.



La pièce est aux antipodes d'Un tramway nommé Désir...Aviez-vous besoin de légèreté après la pièce de Tennessee Williams ?


Cristiana Reali : J'aime toujours faire des choses nouvelles. C'est sûr que par rapport au Tramway, je fais le grand écart. Les spectateurs qui m'ont vu dans les deux pièces me font souvent cette remarque en tournée ! J'aime bien ne pas répéter les mêmes choses, ou alors répéter plus tard, pas tout de suite. J'aime bien changer de registre. Ce genre de pièces, c'est vrai que je ne pouvais le faire qu'avec quelqu'un comme Pierre Guillois, dans des centres dramatiques nationaux où on a un confort artistique extraordinaire. Je trouve que les acteurs devraient pouvoir tout faire.

J'ai beaucoup joué au théâtre, et j'attends toujours la pépite qui va me donner envie. Quand je dis pépite, ce n'est pas la pépite pour le monde entier. C'est pour moi, c'est quelque chose que je vais avoir envie de jouer. Je lis beaucoup de pièces, et même quand elles sont bien écrites et très belles, ce n'est pas toujours celles qui me donnent envie de passer au plateau. J'ai besoin aussi de prendre des risques, de me mettre dans un univers différent, de me donner l'opportunité de montrer autre chose. On n'est pas qu'un seul genre, on n'est pas qu'une seule comédienne.


Que vous soyez au théâtre, au cinéma ou à la télévision, on sent votre plaisir de jouer toujours très fort. Au cinéma, vous étiez récemment la mère surprotectrice de Kev Adams dans Le Jour J de Claude Zidi Junior. Là, c'était un vrai rôle de comédie....


Cristiana Reali : J'ai un âge aujourd'hui où on me propose beaucoup, surtout à la télé et au cinéma, des seconds rôles. C'est un peu le lot de toutes les comédiennes et des actrices. Après, ces rôles sont assez croustillants. C'est le cas de cette mère que j'ai jouée dans le film de Claude Zidi Junior. Ca m'a fait marrer de participer à ce genre de personnages. J'ai fait la même chose dans la série Montmartre pour TF1, où j'ai joué une grande méchante, qui malmène sa belle-fille pour arriver à ses fins. J'ai même eu des messages sur Internet où les gens étaient étonnés que je puisse jouer une femme aussi méchante. J'ai adoré. Ça m'a plu de jouer des choses différentes.


Va-t-on vous voir bientôt à nouveau au cinéma ou à la télévision ?


Cristiana Reali : Je viens de tourner pour France Télévisions un téléfilm sur la violence des rues, réalisé par Adeline Darraux. Je fais une femme battue par son mari, qui est Thierry Godard mais l'histoire est vraiment basée sur des jeunes qui montent une application pour lutter contre la violence des rues. Le rôle principal est tenu par une jeune actrice. Dans quelques jours, on me verra dans Capitaine Marleau. Je n'avais jamais travaillé avec Josée Dayan, ni avec Corinne Masiero. Je joue une petite boulangère et je suis un peu dans l'intrigue policière. C'était très sympa.


Et au théâtre ?


Cristiana Reali : Je lis beaucoup, parce qu'il faut que je choisisse ce que je vais faire après. J'ai pas mal de propositions. Mais j'ai souvent des idées plus que les autres en ont pour moi. On va souvent me proposer un peu ce que j'ai déjà fait. J'ai 2-3 idées de bouquins et de personnages à adapter au théâtre. Pauline Susini avec qui je travaille souvent m'a fait lire des choses qu'elle aimerait adapter. Il y en a une que j'ai adorée. Elle a des rôles de femmes qui ne sont pas toujours les mêmes. Souvent, au théâtre, au cinéma ou à la télé, la mère est excentrique ou envahissante. J'ai joué ces rôles-là avec beaucoup de plaisir mais je n'ai pas envie d'être tout le temps là-dedans. La femme qui règle ses comptes avec son mari, c'est quelque chose qui m'ennuie souvent au théâtre.

Je dis souvent aux producteurs et aux directeurs de têtes que je préfère faire des pièces qui sont des chefs-d'oeuvre qu'on n'a pas vus depuis longtemps que de faire une pièce moyenne en création. Jouer de beaux textes, il n'y a rien de mieux, je trouve, pour un comédien. C'est pour ça que j'aime beaucoup les metteurs en scène actuels qui font beaucoup de créations, mais sur des sujets sociétaux. Je viens de voir Lacrima de Caroline Guiela Nguyen. Ca parle des petites mains dans les ateliers de couture. J'ai trouvé cette idée très originale. J'ai envie de sujet pas souvent abordés et j'ai aussi envie d'une comédie légère parce que l'année prochaine va être difficile, je pense !


Vous avez toujours des projets, des idées en tête...


Cristiana Reali : Dans notre métier, quand on commence quelque chose, on se demande ce qu'on va faire après. On ne se donne jamais le temps de faire juste la chose en se disant on verra. Une fois qu'on a lancé une pièce ou un film, on est déjà en train de penser à ce qu'on va faire après. C'est un peu notre façon de vivre. On réfléchit toujours à ce qu'on va faire. Je suis un peu hyperactive et je ne suis pas patiente dans mon métier. Par exemple, si j'ai une idée, il faut que ça aille vite.

Quand j'ai joué Simone Veil , j'ai eu l'idée du Tramway et j'en ai parlé à Pauline Susini. Quand elle m'a dit oui, je me suis positionnée sur les droits et sur un théâtre. Si la réponse est négative, il faut penser à autre choses mais il ne faut pas traîner. En fait, il faut avoir des idées mais on ne les a pas toujours. On est obligés de les provoquer un peu, de regarder, de se dire tiens, c'est un sujet sympa. Je trouve que c'est important de lire en pensant à ce qu'on pourrait faire. Quand je vois de l'actualité je me dis qu'il y a quelque chose à faire.


Foutue Bergerie de Pierre Guillois au théâtre Anthéa d'Antibes les 10 et 11 décembre


Foutue Bergerie de Pierre Guillois avec Cristiana Reali

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