Le 8 mars, ce sera la journée de la femme. Hasard du calendrier, la salle des Arts d'Azur du Broc mettra à l'honneur une femme aux multiples facettes. Ecrivaine, journaliste, mais aussi artiste de cabaret, Colette était une femme complexe, éprise de liberté, qui ne s'interdisait rien. Dans Music-Hall Colette, un spectacle musical et théâtral mis en scène par Léna Breban, la comédienne Cléo Sénia joue, chante, danse et manie l’art de l’effeuillage pour se questionner et s’émanciper à travers la figure de Colette. Une narration en miroir qui ouvre la réflexion sur les codes actuels du féminisme, de la nudité et de la liberté après plus d’un siècle de combat. Depuis sa création, le spectacle rencontre un beau succès et reçoit des critiques élogieuses de la part de la presse comme du public, si bien que l'année dernière, Cléo Sénia a été nommée aux Molières dans la catégorie révélation féminine.
Contactée par téléphone avant son retour dans les Alpes-Maritimes le 8 mars, (il y a eu une représentation de Music-Hall Colette en décembre dernier à Cannes), Cléo Sénia nous a parlé de ce spectacle, qui lui tient tant à cœur.

Vous étiez à Cannes il y a quelques mois. Le 8 mars, vous serez à la salle des Arts d'Azur du Broc. Partout où vous allez, Music Hall Colette conquiert à la fois la presse et le public. Comment expliquez un tel succès ?
Cléo Sénia : Il y a un souffle de liberté qui plane au-dessus de ce spectacle, parce que Colette s'est réinventée toute sa vie. En voyant Music Hall Colette, les gens découvrent des anecdotes croustillantes et sortent avec beaucoup de légèreté et en éprouvant une forme d'apaisement. On me dit souvent : « merci, on est venu, on était un peu tout gris et on ressort tout ensoleillé ! » Ca fait plaisir d'entendre ça. Beaucoup de messages de gens me remercient aussi pour toute cette liberté qui donne envie d'être comme Colette et de profiter de chaque instant de la vie.
Et comment est né ce spectacle ? Est-ce vous qui en avez-eu l'idée ?
Cléo Sénia : Jai découvert la maison de Colette en 2017, en Bourgogne. Je suis passionnée par les maisons d'artistes. C'est souvent comme ça que je trouve mon inspiration pour mes spectacles. J'ai été vraiment charmée par la maison de Colette. Lorsqu'on m'a raconté son histoire, j'ai trouvé plein de parallèles avec ma vie d'artiste à ce moment-là. J'étais un peu partagée entre la littérature, le théâtre, et les arts du corps, du music-hall, des costumes, des paillettes. Colette m'a permis de faire le lien. Pendant une période, elle a fait du music-hall, ce qui lui a permis d'être beaucoup plus libre, dans son corps, dans sa vie de femme, et dans son écriture. J'ai commencé par le piano puis j'ai fait des écoles de théâtre et j'ai compris qu'il me manquait quelque chose. J'avais envie de m'exprimer davantage avec mon corps, avec le chant et donc j'ai découvert tous les arts du cabaret, du music-hall et toute la créativité, la liberté que ça pouvait me procurer. Je devais créer mes costumes,mon personnage, ma propre mise en scène, mes danses. J'adore mélanger ce que je sais faire. Et ça fait une sorte de mélange un peu singulier, très personnel, qui surprend les gens souvent. Oui, ça fait du bien d'être surpris aussi.
Ce spectacle est, en quelque sorte, un double portrait entre Colette et vous, Cléo, qui êtes une femme d'aujourd'hui...
Cléo Sénia : Exactement ! Je questionne les différents choix de vie de Colette et je les recontextualise aujourd'hui. Lena Bréban, qui a mis en scène le spectacle, a vraiment voulu ce double portrait. Elle m'a dit : « on comprend bien Colette à travers toi. On comprend ce qui te plaît chez elle aujourd'hui, ce qui t'anime. » Donc elle m'a fait franchir ce pas que je n'aurais pas osé franchir seule. Je suis partie des romans de Colette pour la trame de mon spectacle, en faisant des va-et-vient entre Colette, Claudine, que tout le monde connaît, et Cléo. Je développe le féminisme, puis l'homosexualité, ensuite ette histoire d'amour entre Colette et Bertrand. Ca plaît beaucoup aussi aux gens, ce double portrait, parce qu'ils comprennent tout de suite là où je veux en venir et pourquoi elle est importante pour moi aujourd'hui. Et, par conséquent, elle devient importante pour eux, aujourd'hui, là où ils ont envie de la découvrir. A la fin, j'aime toujours aller à la rencontre du public.
Au-delà d'être une écrivaine reconnue, elle était une femme éprise de liberté...
Cléo sénia : Oui, elle a eu trois maris, elle a eu des aventures homosexuelles au tout début du siècle. Elle a été journaliste, a ouvert un salon de beauté, elle a fait du music-hall. Il ne faut pas oublier que c'est l'une des premières femmes à montrer son sein nu sur scène, pour revendiquer sa liberté. Elle avait plusieurs facettes et la liberté l'a toujours guidée pendant toute sa vie : la liberté d'aimer des femmes, des hommes, même son beau-fils, de 30 ans de moins qu'elle. C' est une femme qui ne s'est rien interdit.
Pour préparer un tel spectacle, il vous a fallu beaucoup vous documenter sur Colette, pour bien la connaître...
Cléo Sénia : Sans me vanter, j'ai vraiment tout lu ! Enfin, il y a des choses que je n'ai pas aimées du tout ou qui m'ont vraiment profondément ennuyée. Mais il y a des choses qui m'ont complètement animée. J'ai adoré La vagabonde parce que c'est la période après Willy où elle se questionne sur ce qu'elle va devenir, ce qu'elle va faire. Elle a eu besoine de connaître d'autres choses, son corps, la scène. J'ai aussi écouté une interview d'elle réalisée par le journaliste André Parinaud. J'ai beaucoup aimé trouver aussi les articles de journaux qu'elle a pu écrire, mais aussi des cartes postales. J'ai utilisé plein de supports que je trouvais sur elle. Même, à un moment, elle a créé un salon de beauté : j'ai trouvé les produits qu'elle vendait, ses poudriers !
On a fêté l'année dernière le soixante-dixième anniversaire de la mort de Colette. Y avez-vous participé ?
Cléo Sénia : A la rentrée, il y aura une grande exposition à la BNF. Différents historiens vont parler de Colette. Je vais la représenter sur scène. Et puis, le spectacle a été filmé. Il sera diffusé sur Culture Box le 19 mars.
Y-at-il d'autres femmes qui vous inspirent ?
Cléo sénia : J'ai toujours été complètement amoureuse de Sarah Bernhardt. Mais j'avoue qu'il y a eu beaucoup de spectacles qui sont sortis sur elle à ces derniers temps.En ce moment, Je prépare quelque chose sur une autre femme qui a vraiment marqué l'histoire, dans le domaine médical, mais c'est encore embryonnaire. Je me consacre encore à Colette !
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